Compte rendu de la 6000D 2013 – La course des géants
Cette édition 2013 de la 6000D aura été marquée par une chaleur caniculaire, rarement vue lors de l’épreuve. C’est en contraste avec l’édition précédente qui s’est déroulée sous les orages, mais cela n’aura pas été plus facile pour autant.
Nombreux sont les coureurs à avoir souffert de cette chaleur, (pratiquement 40° à l’arrivée à Aime) et à en avoir payé un lourd tribu. Rarement le nombre d’abandons et de hors délais aura été aussi important : 131 abandons et 146 hors délais… pour seulement 930 arrivants sur les quelques 1240 au départ !
De mémoire de savoyard et de coureurs, il n’est pas souvenir d’une édition aussi caniculaire que celle-ci. Pourtant, si le gros de la troupe en a beaucoup souffert, cela n’a pas eu l’air d’être le cas pour les élites, qui malgré ces conditions ont tenus un train d’enfer tout au long de cette 6000D 2013 !
La course élite :
Du côté des hommes, Sébastien Spehler et Stéphane Ricard, après une bataille de haute lutte tout au long de la course, décidèrent de franchir la ligne d’arrivée ensemble, main dans la main. C’est un bel exemple de sportivité que l’on ne retrouve malheureusement pas assez dans le monde du sport, mais qui démontre un nouvel fois l’état d’esprit des trailers que nous sommes !! Ils devancent de quelques minutes à peine Fabien Chartoire.
Du côté des féminines, la lutte fût elle aussi longtemps indécise et les écarts entre les 3 premières restent infimes à l’arrivée. C’est finalement Aline Coquard qui l’emporte devant Laureline Gaussens et la belle italienne Katia Fori qui complète le podium.
Les résultats de la 6000D :
Cliquez sur : résultats 6000D ou rendez-vous directement en bas de page pour consulter le classement complet
Récit de ma 6000D 2013 :
Allez savoir pourquoi, mais pour une fois, je me sentais plutôt bien et confiant avant le départ de cette 6000D, même si bien sûr, réalisme oblige, je savais qu’il serait difficile de faire une place sur ce type de terrain, que j’affectionne beaucoup, mais sur lequel je n’ai guère l’occasion de m’entraîner.
Fort de mon expérience de l’an dernier, j’ai établi une tactique prudente pour la première partie de course, afin de garder un peu d’énergie pour la descente, qui avec ses quelques petites bosses, n’est pas si facile que cela.
A 6h, pour le départ, la température est encore agréable, la fraîcheur du petit matin nous met dans de bonnes conditions pour la course. Je prend un départ rapide, tout en en gardant un peu sous la pédale, je boucle mon premier km à 15 km/h mais me retrouve déjà absorbé par une bonne partie du peloton, parti extrêmement rapidement. Je stabilise ensuite mon allure à 14 km/h sur la partie plate en longeant l’Isère, avant d’atteindre un petit virage en épingle aux environs du 4ème kilomètre qui marque le début de l’ascension.
Dans les premiers kilomètres de montée, je gère, sans trop forcer et me retrouve parfaitement dans le timing que j’avais planifié. Même si je continue à perdre des places, je sais que la course est longue et que la différence se fera une fois le sommet du Glacier franchi.
Je profites du paysage, de la forêt, des pistes de ski de Montalbert et de l’ambiance festive qui y règne. Rarement j’aurai rencontré un public aussi passionné et chaleureux que sur cette course, un vrai bonheur ! Nous bifurquons ensuite vers la piste de bobsleigh, ce petit détour par rapport à l’année dernière est l’occasion de reprendre un peu de vigueur car du coup la pente est moins raide.
Je n’avais jamais eu l’occasion de m’approcher d’aussi près d’une piste de Bob, et c’est assez surprenant que de courir à l’intérieur de ce boyau de béton aux virages inclinés. C’est impressionnant, au vu de cette inclinaison que d’imaginer ces engins dévalant la pente à pleine vitesse, couchés à plus de 90° par rapport au sol. L’ambiance est là aussi extraordinaire, et pas question pour moi de marcher ne serais-ce qu’un mètre, je me fais un point d’honneur à courir tout le long, ce qui il faut l’avouer n’est pas trop difficile car la pente n’est finalement pas très raide !
Au sortir de la piste de Bob, nous avons un petit kilomètre de plat, histoire de se dégourdir les jambes et de profiter du paysage, avant d’aborder une nouvelle partie très raide et longue qui nous emmènera vers Plagne Centre pour le premier ravitaillement. Je suis encore très bien et ai pris quelques minutes d’avance sur ma feuille de route. Une bonne descente sur un bon kilomètre assez raide, histoire de faire mal aux cuisses et nous arrivons à ce premier ravito.
Juste le temps de remplir mes petites bouteilles d’eau et d’avaler un ou deux quartiers de pomme et c’est reparti ! Nous sommes maintenant dans les alpages et les pistes de ski. La pente est assez raide sur de courtes portions entrecoupées de sections quasiment plates, voire descendantes permettent de se refaire une santé avant d’aborder une partie plus pentue. Nous remontons ainsi dans un premier temps vers le lac de retenue d’eau puis abordons une portion plus raide et caillouteuse pour rejoindre la Roche de Mio.
Insensiblement, je commence à donner quelques signes de faiblesse, pour ne pas hypothéquer mes chances, je lève un peu le pied dans cette portion raide. Tout doucement la chaleur commence à se faire sentir et mes forces également. Mon avance commence à fondre et je me dis que la montée au glacier va être compliquée !
Comme partout l’accueil à la Roche de Mio est extraordinaire, que de monde pour vous encourager !! On bascule alors dans la descente vers le col de la Chiaupe, l’occasion de se dégourdir les jambes et d’accélérer un peu avant d’apercevoir au loin le glacier de Bellecôte qui nous tend les bras !
Il va maintenant falloir rentrer dans le vif du sujet et affronter la montagne ! Mais la chaleur, l’altitude et la fatigue prennent le dessus, je suis au ralenti, que dire, quasiment à l’arrêt ! Nous croisons les premiers qui redescendent déjà mais prennent le temps de nous adresser quelques mots d’encouragements. La pente est raide, les pieds glissent sous les cailloux de cet immense pierrier, je mettrai quasiment 25 minutes pour parcourir le premier kilomètre d’ascension… autant dire une éternité ! Les derniers mètres avant d’atteindre le point de contrôle sont terribles, mais nous sommes portés par la foule qui nous galvanise !
Arrivé en haut au niveau du télécabine, l’aventure et l’ascension ne sont pas terminés pour autant, il faut maintenant affronter un neige molle et profonde pour gravir les derniers mètres qui nous emmènent au point culminant de notre périple. La progression est lente et pénible, pas question de courir, je n’en ai pas la force !
Nous allons aborder la descente, dans la neige pour commencer, cela sera l’occasion pour moi de reprendre un peu de vigueur, je suis plutôt à l’aise sur ce type de terrain. Je remet donc la machine en mode course ! Nous arrivons alors sur une partie très pentue que les premiers ont franchie… sur les fesses ! il y a deux traces qui forment une sorte de toboggan, sans hésitez, je m’assois et me laisse glisser comme cela sur une bonne centaine de mètres, les sensations sont géniales… et rafraîchissantes ! Je revois alors les images de Kilian descendant le Mont Blanc quelques jours auparavant de la même manière ! Que du bonheur, et j’en oublierai presque mon état de fatigue et la chaleur !
La suite de cette descente se fait dans les pierriers, où il ne faut pas hésiter à se laisser glisser avec les cailloux qui roulent pour avancer, à tombeaux ouverts ! Il faut cependant faire attention car nous croisons les coureurs qui continuent à gravir la montagne dans l’autre sens, dans une lente procession…
J’aborde alors une partie de la descente très technique et raide qui nous emmènera vers le terrible col de l’Arpette ! Les cuisses sont mises à rude épreuve, mais elles sont solides et je parviens à maintenir une bonne cadence. Rapidement je rejoins les premières pentes du col et force est de constater qu’il n’y a plus d’essence dans le moteur ! Je suis vidé, exténué et dès le départ je suis contraint de marcher, de marcher lentement, très lentement. La chaleur devient maintenant étouffante, je me demande si je vais pouvoir continuer.
Cela fait bien longtemps que je ne me fais plus d’illusions sur le classement final, je vais être loin, très loin ! Je puise la force de poursuivre mon effort dans les encouragements que je donne Péline par téléphone régulièrement, je sais qu’elle m’attend à Belle Plagne, et pas question pour moi de renoncer ! Mais que c’est difficile, cette montée est longue et je n’en vois pas la fin.
Au sommet de l’Arpette, je me dis que le plus difficile est fait, il faut maintenant se remettre dans la descente vers Belle Plagne ou Péline et mes supporters m’attendent. J’ai du mal, mais je me laisse porter par la descente et les encouragements. A Belle Plagne je prends quelques secondes pour faire un ptit coucou à Péline, Théo, tommy et Nico. Je n’en peux plus et s’ils n’étaient pas là, je serai bien tenté de mettre le clignotant et d’aller directement à l’hôtel, situé juste à quelques mètres de là !! Mais là encore, pas question de les décevoir ! Il ne reste plus qu’une vingtaine de kilomètres, majoritairement en descente… je dois bien tenir le coup !!
C’est sans grande conviction que je me relance donc dans la descente vers Plagn Bellecôte, la pente est raide et le chemin caillouteux, mais il faut y aller ! Et c’est plus difficile de se freiner que d’accélérer, alors je lâche les chevaux… enfin ce qu’il en reste !!
La suite du parcours est majoritairement descendante, mais à la sortie de Bellecôte, une belle côte nous attend encore, histoire de me rappeler que je n’ai plus rien dans le sac ! Je monte péniblement, doucement. La suite de la descente vers Montchanin est plus clémente, juste quelques petites bosses mais rien de méchant. Un chemin assez technique par endroit et une descente difficile, mais je me concentre sur le terrain et les kilomètres défilent vite. Je survis toujours grâce aux encouragements de Péline qui m’appelle régulièrement. Maintenant nous sommes la plupart du temps en sous-bois, rendant la température plus supportable.
Dans les portions descendantes, je rattrape de nombreux concurrents, moins à l’aise que moi sur ce type de terrain, je retrouve un peu de vigueur, même si, dès que le chemin s’élève à nouveau, je me fais reprendre par ces mêmes coureurs.
A Montchanin, il ne reste plus qu’une dizaine de kilomètres à parcourir, dont une bonne partie en descente raide, entrecoupée de petites bosses qui cassent bien le rythme. Je n’ai plus de forces, mais je continue à rattraper des coureurs ce qui me redonne un peu de moral et de courage pour avaler les petites bosses. Je dévale la pente à grandes enjambées, et me dirige doucement vers la portion que je crains le plus : la piste cyclable le long de l’Isère, une portion plane d’environ 2km, terrible pour moi, et qui précède l’arrivée.
J’étouffe, je n’avance plus, mais malgré tout je poursuis ma remontée, je doublerai pas moins de 4 coureurs sur cette portion qui ne m’est pas favorable. Il ne reste plus qu’à remonter vers le centre du village d’Aime par une pente assez raide d’environ 400m. Les coureurs devant moi sont trop loin, je ne les rattraperai pas. Je jette un oeil derrière et constate que j’ai fais le trou sur mon suivant. Je peux donc y aller sereinement, je monte à mon rythme.
Plus que 500m à parcourir, en légère descente. Un dernier coup d’oeil derrière pour m’assurer que personne ne revient et je me laisse basculer vers l’arrivée. Au loin j’aperçois le chrono qui indique 8h49′. Dans un dernier effort je reprends un peu de rythme pour finalement arriver 143ème en 8h49’37”
Mon classement final n’est qu’anecdotique mais je ne suis pas pour autant déçu, je garde en mémoire tous ces paysage majestueux que j’ai traversé, cette ambiance incroyable tout au long du parcours, les encouragements de mes proches qui m’ont portés jusqu’à l’arrivée. Au vu des conditions, je suis déjà content d’être arrivé au bout ! Ce fût une course extraordinaire et difficile. Vivement l’année prochaine que je revienne !
Le classement complet de la 6000D 2013 :